Notre système de santé est constitué d'un secteur
public et d'un secteur privé. Tous deux sont financés
à la fois par l'assurance maladie et le budget de l'état.
Depuis 1983, le budget des hôpitaux publics est fixé unilatéralement
dans le cadre du budget global. Depuis 1996, un objectif quantifié
national (OQN) agit de même pour les établissements privés.
Jusqu'à ces dernières années, les établissements
privés étaient nombreux. Les médecins, les chirurgiens,
les radiologues, les obstétriciens qui y travaillaient en étaient
souvent, pour partie, propriétaires. Le financement des établissements,
qui n'a pas fondamentalement changé, distinguait ce qui était
alloué au fonctionnement de la clinique, aux honoraires des médecins,
aux diverses fournitures nécessitées par les soins aux
patients. Naturellement, les médecins propriétaires réinvestissaient
dans la clinique une partie de leurs honoraires.
Depuis quelques années, on a vu apparaître des acheteurs
de soins. Ces puissantes et peu nombreuses structures financières
se partagent souvent le territoire. Elles se sont appuyées sur
la volonté affichée des tutelles de concentrer l'offre
de soin privée. D'un côté, les agences régionales
d'hospitalisation favorisent, parfois sous l'alibi de normes non respectées,
les regroupements. De l'autre, les acheteurs de soins, parfois cotés
en bourse, rachètent les structures. Ils imposent d'ailleurs
souvent à la communauté médicale de nombreux contrats
léonins.
Dans le secteur privé, l'offre de soins, conçue légitimement
comme part de marché, a été puissamment segmentée
et sélectionnée. De façon, certes un peu caricaturale,
on peut dire que la mission de permanence des soins 24 heures sur 24,
365 jours par an, a été renvoyée à l'hospitalisation
publique. Les établissements privés ont sélectionné
des activités programmées, limitées, souvent peu
coûteuses en personnel (chirurgie ambulatoire ou chirurgie programmée
très normalisée...).
C'est dans ce contexte qu'a été déclenché
l'actuel mouvement de grève des établissements privés.
On comprend son paradoxe. Des établissements privés restructurés,
achetés par des investisseurs, souhaitent assurer un financement
de leur budget de fonctionnement à partir d'un budget captif.
La communauté médicale n'est elle pas envoyée au
front dans ce but ?
La CMH appelle les médecins hospitaliers à assurer dans
les meilleures conditions possibles l'accueil et la bonne prise en charge
des patients qui s'adressent à l'hôpital public. Pour autant,
il apparaît que, si des incidents survenaient du fait de l'incapacité
de prise en charge satisfaisante de certains malades, la responsabilité
en incomberait à ceux qui n'auraient pas assuré la prise
en charge déontologique des soins urgents.
Notre système de santé repose sur un secteur public et
un secteur privé. De toute évidence, les missions et les
financements doivent être mieux définis. La seule politique
de limitation autoritaire des enveloppes a montré de toute évidence
ses limites et, souvent, ses méfaits.
Docteur F. AUBART,