A partir de 5 constats, la CMH forte de sa représentation
hospitalière et hospitalo-universitaire, souhaite vous faire
part de ses propositions mais aussi de ses exigences.
1- LA SITUATION DE L'HÔPITAL : un scénario
catastrophe ?
L'hôpital est victime des dérèglements d'un système
où les transferts d'activités ne sont plus maîtrisés,
où les organisations sont souvent obsolètes et où,
dans le même temps, le manque de temps médical et infirmier
est chaque jour accru. Par un effet pervers, chaque jour plus perceptible,
alors que les contraintes liées à la permanence des
soins pèsent de plus en plus sur l'hôpital, les compétences
médicales refluent trop souvent vers les établissements
privés qui sélectionnent les activités et attirent
les médecins.
PROPOSITIONS :
- Il est indispensable de définir à un niveau territorial
satisfaisant d'organisation. Il s'agit de bassins de population,
à partir desquels doit être organisé le système.
A l'intérieur de ces territoires, il faut assurer la concentration
qu'exigent certaines activités médico-techniques
lourdes et assurer une distribution de proximité de certaines
activités médicales (consultations, certaines hospitalisations,
chirurgie ambulatoire...).
- Il faut financer un plan pluriannuel d'investissement pour permettre
cette réorganisation. On n'a jamais vu une restructuration
de cette ampleur se faire sans une politique d'investissement
importante.
- Il faut réduire les inégalités non pas
en écrêtant les budgets pour tendre vers un budget
moyen mais en établissant une véritable politique
budgétaire contractuelle intégrant notamment un
lien entre activité et qualité.
2 - LA PLACE ET LE RÔLE DES MÉDECINS
A L'HÔPITAL ONT ÉTÉ MARGINALISES
Alors qu'en affichage, on prône l'engagement et la responsabilité,
les responsabilités sont en fait transférées
et deviennent incompatibles avec les objectifs recherchés.
En particulier, au fil du temps, médecins et pharmaciens hospitaliers
ont vu leur place et leur mission banalisées. Sont-ils des
producteurs de soins parmi d'autres ? Nous pensons au contraire que
cette déresponsabilisation participe à la crise.
PROPOSITIONS :
- Affirmer les missions et les responsabilités des médecins
au service des malades et du public. Celles-ci doivent s'exercer
en fonction des compétences, à différents
niveaux : services, établissements, bassins de population,
régions.
- Il convient de revenir sur certaines décisions telle
le décret n°2002-550 du 19 avril 2002 créant
un corps de directeur des soins (voir annexe). Ce texte organise,
de façon centralisée et Impersonnelle, un transfert
de responsabilité en terme d'organisation et d'animation
des soins que doivent, au contraire assurer les responsables médicaux.
3 - DÉMOGRAPHIE DES PROFESSIONNELS
DE SANTÉ
Les rapports récents de la DGS et de la DHOS ont notamment
permis de disposer d'une base documentaire reconnue.
PROPOSITIONS :
- Augmentation des numerus clausus (médecins et pharmaciens)
pour maintenir la densité actuelle médicale.
- Augmentation du nombre des internes DES dans le cadre de l'indispensable
réforme des études médicales et notamment
de son 3ème cycle avec prise en compte des spécialités
nouvelles que sont notamment la médecine d'urgence et la
gériatrie.
- Redistribution public/privé. A titre d'exemple, dans
une des régions où la crise démographique
est la plus importante, la région Centre,
2 anesthésistes sur 3 travaillent à l'hôpital
public alors que 2 chirurgiens et 2 gynéco-obstétriciens
sur 3 travaillent dans le secteur libéral.
Des mesures de reconstitution de carrière doivent permettre
d'amorcer cette
redistribution. Ce mouvement doit être équitable.
Cela signifie que, pour les praticiens qui ont choisi une carrière
hospitalière publique, leur reprise d'ancienneté
doit intégrer l'ensemble des années passées
sous des statuts divers à l'hôpital et, en particulier,
les années d'internat.
- La démographie médicale ne se conçoit pas
sans une prise en compte de la démographie de l'ensemble
des professionnels qui travaillent à l'hôpital. A
titre d'exemple, la promotion de la notion d'équipe opératoire
dans les blocs opératoires concerne la démographie
des infirmières spécialisées. Il en est de
même dans nombre d'activités médicales et
pharmaceutiques de l'hôpital.
4 - RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL
Le protocole signé de façon unanime par les organisations
syndicales de praticiens hospitaliers doit être respecté.
Cependant, sa mise en uvre doit être accompagnée
d'éléments complémentaires.
PROPOSITIONS :
- La mise en uvre de la RTT doit s'appuyer sur des choix
volontaires. A titre d'exemple, si de façon individuelle
et volontaire, un praticien souhaite ne pas bénéficier,
par exemple, de ses 20 jours annuels de RTT, il doit pouvoir bénéficier,
de façon statutaire, de l'équivalent d'un 13ème
mois rémunéré. Naturellement, des modulations
et de la souplesse doivent être trouvées dans ce
type d'initiative.
- Le post internat et, plus généralement, l'assistanat,
doivent faire l'objet d'une extension voire d'une généralisation.
La CMH considère que la création de postes d'assistants
en médecine d'urgence et en gériatrie dans les CHU
est nécessaire.
- La politique de création de postes contenue dans le protocole
n'a pas été mise en uvre. Il en est ainsi,
en particulier, des postes d'assistants 2002 annoncés comme
financés en année pleine. L'objectif des 3500 postes
créés contenu dans le protocole doit être
réalisé.
- La mise en uvre de la RTT ne peut, de toute façon,
se concevoir à organisation constante. On renvoie aux propos
et aux propositions précédentes.
5 - L'HÔPITAL ET L'ORGANISATION GÉNÉRALE
DU SYSTÈME DE SANTÉ
Aujourd'hui se déroule une réunion de négociation
essentielle concernant la reconnaissance de la rémunération
de la consultation des médecins libéraux. Cette revalorisation
est légitime. Cependant, derrière cette revendication,
le mode d'action choisi qui consiste à faire la grève
des gardes n'est pas un hasard. L'enjeu est de savoir si l'hôpital
public doit à lui seul assurer continuité des soins
et prise en charge des urgences.
Cette crise touche aux valeurs essentielles déontologiques,
éthiques et organisationnelles de notre système. Celui-ci
ne doit pas diversifier ses financeurs au premier franc sous peine
de voir sélectionner les activités, les médecins
et donc les patients. Dans le respect de la dualité public/privé,
des modes nouveaux d'organisation et de partage doivent être
trouvés. Ils doivent permettre à l'hôpital d'assurer
l'ensemble de ses missions en attirant les meilleures compétences
professionnelles.
F Aubart Président de la CMH
Le 4 juin 2002