Réforme de la sécurité sociale:
... les assureurs privés tirent les premiers !
Après les retraites, la réforme de la sécurité sociale
est le chantier le plus lourd et
périlleux auquel a prévu de s’attaquer le gouvernement.
Nous
publions une interview
d’Alain Rouché, directeur santé de la Fédération
française des sociétés d’assurance
(FFSA) et la réaction du député socialiste Jean-Marie
Le Guen.
Alain Rouché (FFSA) :
« les assureurs font une proposition globale »
Officiel Santé - Quelles sont
les grandes lignes de la proposition
faite par les assureurs
pour la réforme de la
sécurité sociale ?
Alain Rouché - Notre proposition
est générale, et s’articule
en trois grands volets. Le
premier est organisationnel
avec la création d’un « conseil
de sages » composé de personnalités
indépendantes et
chargé de définir le « panier
de soins » indispensable
devant être pris en charge
(c’est une idée qui rejoint
celle avancée récemment par
monsieur Mattéi qui propose
la création d’un « haut
conseil du remboursement »).
En plus de ce « conseil des
sages », nous proposons aussi
la création d’une agence de
coordination entre le régime
obligatoire de l’assurance
maladie et les assureurs complémentaires.
Le deuxième volet de notre
proposition porte sur
meilleure gestion du risque
santé. Dans ce domaine, il y
a beaucoup d’initiatives à prendre… la chose la plus
importante est de se donner
des objectifs et de mesurer
les résultats avec des indicateurs
en établissant des comparaisons
qui favorisent
l’émulation. Les pilotes, chargés
de gérer les dépenses de
prestations comme les frais
de gestion, devraient être des
Agences régionales de santé (ARS qui se substitueraient
aux ARH) au nombre de huit,
et non pas de vingt deux. Il y
a beaucoup d’économies
possibles résultant d’une
meilleure affectation des
tâches entre professionnel de
santé : par exemple, le détartrage
des dents pourrait être
fait par un assistant dentaire
plutôt que par un dentiste.
Enfin, la troisième partie de
notre proposition est de donner
une part plus importante à
l’assurance volontaire qui
interviendrait au premier
euro dans certains domaines
(optique, dentaire, audio-prothèse,
petits appareillages
réunis sous l’appellation
TIPS), tout comme pour certaines
prestations non prises
en charge par la sécurité sociale et les médicaments
déremboursés (à condition
qu’ils soient effectivement
reconnus comme rendant un
service médical).
Votre proposition aborde-telle
la gestion hospitalière ?
C’est un domaine où nous
sommes prudents, compte
tenu du manque d’informations
dont nous disposons (et
c’est d’ailleurs une de nos
revendications que de disposer
de plus d’informations sur
la gestion hospitalière
comme sur les médicaments…).
Globalement, nous
proposons que le régime
obligatoire de l’Assurance
maladie se recentre sur son
cœur de métier, à savoir les
affections de longue durée
qui représente 50 % des
dépenses et concerne l’hôpital
ou les réseaux ville-hôpital.
Mais nous proposons
d’intervenir dans les
domaines de la traumatologie
et de la rééducation suite
aux accidents de la route ou
du travail où les assureurs de
responsabilité possèdent de
l’expérience. S’agissant du
financement, nous sommes
plutôt favorables au système
de rémunération à l’activité par opposition
au budget global.
Dans quel cadre avez-vous été amenéà faire ces
propositions
et comment ont-elles été accueillies ?
Dans la lignée des trois
groupes de travail constitués
au sein de la commission
des comptes de la sécurité sociale, le ministre de la
santé, monsieur Mattéi, a
adressé au mois de mars une
lettre à trente six organismes
concernés leur demandant
leurs propositions pour la
réforme de l’assurance
maladie. Nous avons rendu
publique notre proposition
début juin, et d’autres
comme la FNMF (mutualité)
ou la CSMF (médecins libéraux)
l’ont fait aussi ;
l’accueil a été divers, mais
je remarque surtout que l’on
ne retient souvent que la
partie de notre proposition
de prise en charge au
1er euro de certains dépenses.
Regrettez-vous que, sur ce
dossier, la volonté de
réforme du gouvernement
semble bien émoussée ?
Je n’ai pas à me prononcer,
mais il est évident que la
réforme de la sécurité sociale présente des difficultés équivalentes à celle
des retraites, avec en plus un
impact immédiat sur le budget
des ménages. Cela dit, il
faut quand même souligner
que le déficit de la sécurité sociale atteindra sans
doute environ 10 milliards d’euros
en 2003, soit 16 milliards
d’euros sur les deux dernières
années ; c’est une
somme à prendre en considération
!
Le gouvernement a annoncé qu’il n’y aurait pas de grand
chamboulement à la rentrée,
mais qu’il s’agirait d’une
réforme progressive s’étalant
sur la durée de la législature.
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