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PETITE HISTOIRE, CE JEUDI 13 SEPTEMBRE RUE DE GRENELLE

Ça y est, Madame la ministre reçoit les syndicats de médecins et pharmaciens hospitaliers. Il est 15 heures. La rencontre est solennelle. Elle a lieu Salle des Accords, marquée de façon indélébile par les accords de Grenelle. Aujourd’hui, on est loin de cette envolée. Madame E. Guigou, ministre de l’Emploi et de la Solidarité, fait une déclaration liminaire pour indiquer qu’elle considère cette négociation comme des plus importantes. À ses côtés B. Kouchner reconnaît, dans un style très direct, les difficultés du dossier et le chemin qui reste à parcourir. Une heure plus tard, après un tour de table, la séance va se lever. Le ministre délégué propose de continuer en se revoyant la semaine suivante, cette fois Avenue de Ségur. Si le café nous a été servi dans d’agréables tasses en porcelaine, le contenu des propositions est insupportable (10 jours de RTT, financement de la garde « sucré »…). La CMH appelle à manifester le 20 septembre 2001 avec les personnels hospitaliers.


JEUDI 20 SEPTEMBRE MANIFESTATIONS REGIONALE


Les médecins et la CMH sont présents dans une dizaine de manifestations régionales. À Paris, biologistes, chirurgiens, urgentistes et psychiatres sont particulièrement bien représentés. En fin de journée, un point de presse est tenu pour mettre en avant nos propositions : pas moins de 20 jours de RTT, exigence absolue de financer les heures de nuit plus pénibles, plus longues et plus denses, à hauteur au moins de l’actuelle garde, création au moins de 3000 postes avec une relance vigoureuse de la démographie médicale pour toutes les générations.


MARDI 25 SEPTEMBRE AVENUE DE SEGUR


La négociation reprend sous la présidence de Bernard Kouchner. Le café est servi dans des verres en carton, le contenu ne s’améliore guère. On évoque une quinzaine de jours de RTT. La discussion s’enlise sur les comptages horaires vantés par certains. La CMH refuse un comptage pointilleux aboutissant à transformer le médecin hospitalier en fonctionnaire ou en cadre. Devant le blocage, la CMH confirme sa participation aux manifestations du jeudi 27 septembre. Nous y sommes plus nombreux que la semaine précédente. Le soleil brille, le ciel est bleu, le blocage continu. Notre délégation qui sera reçue au ministère au terme de ces manifestations perçoit un changement de ton et l’amorce d’une évolution sur les dossiers chauds. Mais aucune proposition concrète ne vient conforter cette impression. Les quatre organisations syndicales de praticiens hospitaliers se réunissent alors le 28 septembre et décident d’un mot d’ordre de grève nationale d’une heure pour le 5 octobre et d’une grève de 24 heures des soins non-urgents le 12 octobre si la situation reste figée.


MERCREDI 3 OCTOBRE


Le mercredi 3 octobre, la CMH est reçue par le ministre et son cabinet. Cette démarche a pour but de faire part de nos exigences et le dossier de nos propositions (20 jours au moins de RTT dans le cadre d’un compte épargne temps souple vont permettre l’obtention d’une année sabbatique, paiement d’une indemnité de nuit au moins équivalente à la garde, amélioration de la situation des astreintes, création de 3000 postes dans un plan pluriannuel). Il semble sur que ces objectifs sont partagés par le ministre qui pèse de tout son poids dans les arbitrages inter-ministériels.


VENDREDI 5 OCTOBRE LE CHANGEMENT DANS LA CONTINUITE


Les quatre intersyndicales tiennent une conférence de presse commune le 5 octobre aumatin avant de se retrouver Avenue de Ségur à 10 heures pour une nouvelle séance de discussion. Si on y annonce 18jours de RTT et une amélioration concernant la prime de sujétion de nuit, on est encore loin du compte et, au terme de cette journée, la grève du vendredi 12 est confirmée.


VENDREDI 12 OCTOBRE GREVE DES MEDECINS ET PHARMACIENS HOSPITALIERS


L’action unitaire est soutenuedans tous les hôpitaux, CHU comme CHG. Nombreux sont les établissements où plus de 80% des praticiens observent le mot d’ordre de grève. Des assemblées générales ont lieu dans les établissements, les exigences sont renouvelées. La CMH poursuit son action tant au niveau des hôpitaux, des médias que du cabinet de Bernard Kouchner. On aboutit à la présentation d’un nouveau texte le lundi 15 octobre. Cette réunion, même parasitée par la suspicion liée à la psychose du charbon, permet au ministre de présenter un texte très voisin de celui qui sera signé la semaine suivante. Nous obtenons encore quelques avancées (astreintes). L’ultime réunion a lieu le lundi 22 octobre pour la signature del’accord. Cette séance ressemble à un vaudeville dans la forme, mais constitue, dans le fond, une indéniable victoire syndicale. Vaudeville car, après les attitudes de matamore de certains, les « coups » ou les effets de
manche, toutes les organisations signent ce protocole. Victoire syndicale car, après les accords de mars 2000 (création de l’indemnité de service public exclusif, repyramidage de la carrière…). Nous obtenons, dans le cadre d’un fonctionnement souple respectant l’indépendance de notre statut, des règles satisfaisantes de mise en oeuvre de la RTT. Au passage, nous obtenons une amélioration des conditions d’indemnisation de la garde et de l’astreinte, l’année sabbatique, 2000 postes créés dans un plan pluriannuel avec un starter de recrutement pour les assistants…
La RTT pour les médecins.

Petite histoire d’une négociation , Dr François Aubart

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