Réduction du temps de travail : les propositions de la CMH
Auditionnée par la Mission
nationale dévaluation récemment mise en place par le ministère,
la Coordination médicale hospitalière
a été amené à faire cinq propositions.
Les accords nationaux signés avec le gouvernement par certains syndicats
de personnel hospitalier d’une part, et par l’ensemble des organisations
syndicales médicales d’autre part, avaient trois objectifs :
améliorer les conditions de travail, réorganiser les activités
médicales autour et en faveur du patient, favoriser les recrutements
dans un secteur à forte capacité d’emploi.
Aujourd’hui, on est bien loin de la réalisation de ces objectifs
!
En effet, et en pratique, L’amélioration attendue des conditions
de travail se transforme en charges et tensions supplémentaires. La
réorganisation des activités autour et en faveur du patient
n’a pas eu lieu. la charge de travail augmente parallèlement
à celle des missions et des pressions qui s’exercent sur l’hôpital
dans son ensemble
Dans ces conditions, nous estimons que le temps de soins que peut consacrer
le médecin hospitalier à ses patients est inférieur à
60 % de son temps de travail. Enfin des activités pourtant très
promotionnelles comme la recherche clinique et parfois la formation, sont
fragilisées voire remises en cause.
La mise en route de la RTT s’est accompagnée d’une volonté
affichée de réorganisation des hôpitaux au profit des
patients. Mais le calendrier imposé et la méthode choisie ont
été irréalistes. La circulaire du 30 janvier fixait en
juin dernier l’échéance des propositions de réorganisation
hospitalière et inter hospitalière. La circulaire du 26 juillet
repousse à l’automne ces propositions. Sur le terrain, le poids
de l’autonomie des établissements, le doute et la déception
des personnels, la déresponsabilisation et la fragilisation de la communauté
médicale explique l’immobilisme.
Favoriser les recrutements dans un secteur à forte capacité
d’emploi.
Cet objectif paraît d’autant irréaliste que si on excepte
les mesures visant à augmenter les capacités d’accès
aux écoles d’infirmière, les choix démographiques
ont été marqués par l’imprévoyance voir
le contre sens. Pour les personnels, le plan triennal de recrutement aboutit
à un saupoudrage inefficace. Quant aux engagements présents
dans le protocole médical de 2001, ils n’ont été
tenus qu’en apparence. A titre d’exemple, en 2002, on a assisté
à la création de postes virtuels. Tel un prestidigitateur, les
interlocuteurs gouvernementaux font reculer les échéances de
création de postes au fur et à mesure que l’horizon recule.
Le sentiment de tricherie sur les calendriers et les recrutements prend de
l’ampleur. La fongibilité des financements répond à
une logique de souplesse et de responsabilisation des régions. En pratique
elle autorise l’utilisation de ce financement pour parer au plus pressé
sans rapport souvent avec l’objectif initial.
Propositions de la CMH : injecter du sang neuf à l’hôpital.
Rendre crédibles les recrutements médicaux à l’hôpital
Tout en renouvelant la demande que se poursuive l’élargissement
du numerus clausus pour aboutir, sur quelques années, à 7000,
la CMH fait cinq propositions :
Il s’agit d’abord, appuyé sur la réforme du 3e cycle des études médicales d’augmenter de façon très significative le nombre des internes DES. Celui-ci a été diminué par deux au cours de la dernière décennie. Actuellement les statuts juniors représentent 13 000 étudiants à l’hôpital contre à peu près 30 000 au début des années 80… Son augmentation doit répondre aux soucis de rajeunissement des communautés médicales hospitalières au dynamisme qu’apportent les échanges inter générationnels, au redéploiement de force vive dans les spécialités médicales. A ce titre, les spécialités émergentes telles la gériatrie et la médecine d’urgence doivent voir leur reconnaissance assurée. D’une façon générale une réflexion rapide doit être menée sur les statuts médicaux juniors à l’hôpital.
Dans le même esprit, l’élargissement du nombre des assistants
et en particulier des assistants spécialistes est un vrai enjeu. La
CMH est favorable à un post internat obligatoire. Cette obligation
doit être accompagnée d’une véritable reconnaissance
des assistants. Leur carrière devrait être intégrée
en parallèle du début de carrière de praticien hospitalier.
La création de poste d’assistants spécialistes en CHU
doit être limitée à la gériatrie et à la
médecine d’urgence.
Le nouveau statut des attachés telles qu’il a été
discuté en 2001 et repris par l’actuel ministre doit être
validé et crée. Il peut permettre d’assurer un lien retrouvé
entre la médecine de ville et la médecine hospitalière.
Il doit permettre d’assurer une souplesse nécessaire au fonctionnement
du service tout en préservant les droits des attachés. Le protocole
d’accord prévoit un objectif de création de 3 500 postes
dont 2 000 en 2002 et 2003. La réflexion devrait donc intégrer
ces propositions et notamment voir élargir les créations de
postes d’assistants.
Il faut assurer, dans l’équité et dans certaines conditions,
la reprise d’ancienneté des praticiens libéraux qui veulent
faire carrière à l’hôpital. Naturellement, le corollaire
signifie que la reprise d’ancienneté doit s’appliquer à
celles et ceux qui ont travaillés à l’hôpital sous
des statuts temporaires.
Il faut favoriser la venue des chefs de clinique et assistants spécialistes
par des mesures spécifiques liées au statut d’assistant
d’une part au niveau d’intégration d’autre part.
Cette mesure est indispensable pour favoriser la promotion de la compétence.
Redonner place au choix sur les modes de réalisation de la RTT :
Temps compté, temps payé, temps cumulé.
60 % des praticiens hospitaliers souhaitent prendre leur jour de RTT au fil
de l’eau. 25 % acceptent une rémunération correspondante.
Actuellement le CET n’a guère de crédibilité.
Au moment où le temps médical est rare, l’assouplissement
par paiement de jours RTT mérite d’être reconduit après
concertation. Une place doit être donnée à la reconnaissance
financière du travail sur la base du volontariat.
Revaloriser les astreintes, revisiter certains textes réglementaires
sur la permanence des soins. La permanence des soins est une contrainte majeure
mais indissociable du service public hospitalier. La réorganisation
des plans de garde se fait avec difficulté et lenteur. La revalorisation
des astreintes pourrait avoir un effet incitatif fort permettant de réorganiser
les lignes de garde dans un souci de compétence et de niveau d’activité.
La place des jeunes générations doit être revue dans l’organisation et les responsabilités en garde. A titre d’exemple, les internes de 3ème et 4ème année de réanimation peuvent dans certaines conditions, participer au système de garde. Sans remettre en cause les principes qui ont dicté l’objectif de séniorisation, une réflexion doit permettre de reconnaître les compétences acquises au cours du 3e cycle et notamment dans sa 2e partie.
Enfin, certains textes réglementaires doivent être revus. Il en est ainsi, par exemple, des textes concernant les services d’accueil et d’urgence dont le niveau d’exigence normative ne correspond pas toujours à la réalité.
Création de projets médicaux par territoire.
Sauf à remettre en cause l’accès aux soins, la mise en
œuvre de la RTT doit s’accompagner de réorganisation territoriale
et de réorganisation des activités médicales. Si dans
sa présentation initiale le gouvernement avait indiqué que la
réorganisation médicale devait charpenter la mise en œuvre
de la RTT il n’en est rien.
La création d’équipe de taille suffisante peut être
imaginée de deux manières ; il s’agit soit du regroupement
d’équipe sur un seul site soit de la création d’une
équipe commune intervenant sur un territoire donné. La 1e hypothèse
aboutit souvent à la création de mégapole ne répondant
au besoin de la population ni à la réalité de la planification
territoriale. La création de projets médicaux par spécialité
et par territoire permet de répondre à l’objectif de concentration
technologique et aux contraintes liées à l’aménagement
du territoire. Pour ce faire, l’impact des primes d’exercice multi
sites est encore insuffisamment utilisé. Ce mode de promotion doit
être développé. Par ailleurs, les projets par spécialités
doivent s’appuyer sur l’action des sociétés savantes
et trouver, auprès des ARH, une logistique et un soutien actif (moyens
informatiques et de communication, dossiers médicaux…) Dans tous
les cas, une responsabilité médicale retrouvée doit être
affirmée.
La situation actuelle se caractérise par une perte de confiance quant à la capacité de mettre en œuvre un accord national. L’impression prédominante est celle d’un marché de dupe. Pour rétablir la confiance il faut établir des calendriers réalistes et en tirer les conséquences en terme de rémunération et de recrutements.
F.A.